POURSUITES EN REPARATION DES DELITS ET CONTRAVENTIONS COMMIS DANS LES BOIS COMMUNAUX SOUMIS AU REGIME FORESTIER AU XIXe SIECLE
ARTICLE
En 1827, pour assurer la protection des forêts communales, le législateur met en place un système particulièrement protecteur. Dès lors qu’ils répondront à certains critères, les communaux boisés échapperont à la libre administration des responsables locaux pour être gérés par l’administration forestière, particulièrement soucieuse de leur conservation, de leur préservation, de leur accroissement. L’article 90 du Code forestier instaure un régime d’exception, avec pour effet de placer les bois qui y sont soumis en dehors du droit commun. Ils subiront un aménagement particulier, supporteront d’importantes restrictions au droit de propriété, mais a contrario, ils bénéficieront de servitudes spéciales et seront particulièrement protégés contre les déprédateurs.
À cause du danger qu’ils font courir aux communaux boisés, bien souvent les délinquants forestiers tombent sous le coup de règles particulières mais afin d’éviter tout arbitraire, le fait constitutif du délit ou de l’infraction doit être clairement déterminé. À partir de 1827, le commencement d’exécution est également punissable, la preuve étant rapportée par les gardes forestiers, les gardes champêtres ou les gendarmes.
L’article 171 du Code forestier, conforté par l’article 187, attribue aux seuls tribunaux correctionnels la connaissance de tous les délits et contraventions commis dans les bois et forêts soumis au régime forestier et l’article 159 confie les poursuites judiciaires à l’administration forestière, sans préjudice du droit qui appartient au ministère public. L’administration forestière est donc compétente pour intenter toute action relative aux délits et contraventions, comme cela est fixé par le titre XI du Code forestier, mais cette compétence ne s’étend pas aux poursuites à fins civiles qui ne peuvent être intentées que par l’administration des domaines après décision ministérielle.
Les principaux délits sont relevés dans le domaine de la chasse, des adjudications de coupes, de partage de bois d’affouage, de coupes et d’enlèvements d’arbres, d’extraction de menus produits, de droits de pâturage, de constructions dans le périmètre prohibé ou d’incendies.
Il ressort des archives que l’administration forestière veille avec grand soin à la poursuite des délits et contraventions, vigilance qui cependant doit être soigneusement encadrée. Pour que la protection des communaux boisés soit correctement assurée, le législateur a mis en place un arsenal juridique qui permet à l’administration d’œuvrer avec le maximum de sécurité. C’est pourquoi il lui est permis de recourir à la force publique et à la saisie ou la mise sous séquestre. Cependant, pour respecter l’esprit du droit, les actions ne peuvent être intentées que dans certains délais et les voies de recours ne connaissent pas de dérogation.
Au XIXe siècle, l’administration forestière a parfaitement joué son rôle de répression, elle était d’une grande vigilance, que certains d’ailleurs devaient trouver féroce. En 1827, le législateur craignait que la nouvelle loi ne soit pas respectée, aussi a-t-il mis en place toutes les mesures nécessaires afin d’assurer la protection des forêts soumises. Il ne fait aucun doute que cet objectif a été atteint, avec cependant un prix payé par les populations les plus pauvres qui ne peut être passé sous silence, les peines étant extrêmement lourdes pour des délits qui devaient sembler bien insignifiants dans des forêts souvent fort pauvres par nature et dégradées par les ponctions régulières opérées au fil des siècles.
Il est exact que par la stricte application de la loi, les agents forestiers ont évincé de la forêt les individus pour qui elle représentait un secours indispensable, mais il semble prudent de tempérer ce jugement. Tout d’abord, il faut bien être conscient que sans l’intervention du législateur, de toutes façons, les plus pauvres auraient été dessaisis des forêts, suite à leur disparition. Encore une cinquantaine d’années sous le même régime et les usagers qui déjà manquaient de bois auraient été totalement démunis. Ils ont donc vu leurs droits considérablement restreints, mais sans cette intervention, ils perdaient davantage encore. L’administration réduisait les droits et les prolongeait. C’était un moindre mal pour l’immédiat, un avantage pour l’avenir.